J’ai repris la course il y a quelques jours. Quand je dis reprendre c’est histoire de briser le cercle du ne pas courir une semaine, puis deux, puis trois, puis quatre ; se faire une montagne de la reprise ; voir le côté lourd de l’intendance prendre ses affaires, de quoi se doucher, prévoir un casse-croûte ; ne pas courir cinq semaines, puis six, puis vingt. J’ai couru deux fois, on peut supposer que la machine est repartie. Étrange ces activités commencées, qu’on a commencé à adorer, devenues nécessaires, mises en pauses qui nous paraissent si pénibles à reprendre. Ceux qui vont à la piscine comprendront. J’ai aussi réalisé que la course c’était du temps de cerveau disponible. Un neurone pour la jambe gauche, un pour la droite, un troisième pour l’analyse du terrain et un dernier qui assure cœur et poumons. Ça en laisse plein pour le reste. Quand on arrive aux endorphines on passe en tout auto et le bulbe fait ce qu’il veut. Des idées reviennent, des réflexions naissent et des questions se posent. Bizarrement je retrouve un peu le temps pour soi de l’époque où je me faisais quarante-cinq minutes de bus deux fois par jour. Vagabonder dos à la route par la fenêtre en verre securit. Après j’ai changé de boulot, eu des enfants à aller chercher à l’école, acheté un scooter et perdu ça. Bon le bus tous les jours c’était aussi bien chiant. Retour deux paragraphes plus haut. La question du moment c’est l’avenir de ce blog. Cela fait presque six ans, old, que j’écris ici. La forme a globalement peu changée blanc austère, le fond un peu plus ; peut être un peu moins noir ou un peu moins « ce week-end j’ai fait ça lol ». Encore que. Je ne sais pas. De son côté, si j’en crois les statistiques du wordpress, la fréquentation est restée confidentielle. On n’écrit pas pour être lu, attention whore exceptés, mais écrire pour ne pas être lu ne fait pas de sens non plus. Sinon on prend un carnet, pas un blog sur les internets. Je pourrais aussi être tenté par la conjecture sur l’intérêt de ce que j’écris. Mais je ne préfère pas. Aujourd’hui je me trouve donc partagé entre l’envie de recentrer, les blogueurs -je n’ose dire nous- parlent de ligne éditorial comme si on écrivait un magazine, et celle d’ouvrir encore un peu. Le fait est que je suis incapable de rester cadré, incapable de ne parler que photo, que bouquins, que dessin, que musique ou de ne faire qu’écrire ; du coup c’est un peu mort pour la recentralisation. J’envie les monomaniaques et les spécialistes. Reste le vaste foutoir où les recettes de crumble côtoieraient des dessins à l’encre, où les expériences scientifiques côtoieraient des histoires de déménagements, où les photos se mêleraient à de la course à pied. Vu comme ça je ne suis pas sûr d’avoir envie. Ou bien fermer. La question se pose, avec régularité. Le phénomène s’étend, retour IRL et fermeture de tout : du blog, du twitter et de l’égo, n’y existeraient pas les quelques personnes avec qui j’aime bien échanger. Ne garder que facebook et les copains d’enfance. Paradoxal pour un site où je vais assez peu. La boucle est bouclée. Vaste dilemme. Prendre une décision et arrêter de se poser la question. Voilà ce qu’il me faut. Ou peut être juste prendre une profonde inspiration, un, deux, trois, sourire et continuer.